Les Jeannettes, l’épicerie éco-responsable

En 2012, j’allais à la rencontre des commerçants de la commune de Carantec pour leur proposer de créer un site web qui les référence et les valorise avec justesse. J’étais déjà sensible à l’éthique, à l’environnement, à l’approvisionnement en local, j’avais proposé un encart « Bio Éthic Écolo ». Les commerçants ne communiquaient pas encore sur ces valeurs. Ensemble, on a fait un gros travail, on a construit un bel outil de communication. La preuve, trois ans plus tard, à la demande de la CCI, le concept se déclinait pour Saint-Pol de Léon.

Cette valorisation du petit commerce me tient toujours à cœur. J’ai toujours envie d’aller à la rencontre des acteurs de mon territoire, de ceux qu’il faut encourager, de ceux dont la démarche est admirable.
Celle de Pauline et Chloé, fondatrices de l’Épicerie des Jeannettes l’est de toute évidence.

La genèse : un road trip en Nouvelle Zélande

Pauline a voyagé en Nouvelle Zélande, elle a sillonné les routes de ce pays lointain à bord de son van. « On a une approche tout de suite beaucoup plus écolo quand on vit dans une si petite maison : la poubelle prend vite de la place, sent vite très mauvais et on ne peut pas toujours s’en débarrasser quand on veut ». Alors, m’explique Pauline, « on commence à faire gaffe, à faire ses achats aussi en fonction des déchets que ça va générer. Pareil pour l’eau, on ne la gaspille pas, on la gère avec intelligence, on s’adapte à cette denrée finalement assez rare. La douche ? Pas tous les jours, par mesure d’économie. Un toilette de chat suffit bien souvent. »
Et de kilomètres en kilomètres, notre Pauline adopte un nouveau mode de vie.

Les débuts des Jeannettes

Au retour à Morlaix, forcément, Pauline ne voit plus les choses comme avant. Avec sa copine Chloé, elle décide de lancer son premier cri d’appel pour sensibiliser le public, avec un petit fanzine pédagogique qui donne des clés pour bien consommer, pour bien recycler.

Le projet d’une épicerie de proximité voit le jour

Après neuf mois de préparation, l’épicerie ouvre ses portes au public en décembre 2018, il y a un an tout juste. Elle ne désemplit pas, c’est preuve qu’il y a encore une clientèle pour fréquenter le centre-ville. Quand je suis passée à la boutique, il y avait du monde sans arrêt, et c’est comme ça toute la journée ! Chloé et Pauline l’ont bien compris, il y a une vraie demande, un vrai besoin. Il y a des gens qui partagent leurs valeurs.

Les aspirations des Jeannettes

La démarche des Jeannettes s’appuie sur quatre piliers fondamentaux :

  • En priorité : l’approvisionnement auprès de fournisseurs locaux, pour minimiser les excès de transports et favoriser l’économie locale, toujours avec un objectif de qualité évidemment.
Parmi les produits proposés à l’Épicerie, une grande variété de savons et shampoings secs, tous fabriqués en Bretagne.
Les légumes de saisons, ceux qui poussent bien en Bretagne viennent en partie de Plougonven.
  • En second : le produit Bio, parce qu’il respecte la terre et la santé. Pauline y est sensible, à tel point que pour sa consommation personnelle, elle fait pousser toutes sortes de légumes dans son petit potager à la campagne.

  • Et pour les produits qu’on ne peut pas fabriquer en Bretagne : des fournisseurs grossistes aux valeurs éthiques. Pauline et Chloé ont choisi de travailler avec Terra Libra : c’est en voyageant partout dans le monde que sont sélectionnés les fournisseurs de cette entreprise, en fonction de critères de respect de l’environnement et de l’humain.
  • Du recyclable, du respect de l’environnement : chez les Jeannettes, on vient avec ses petits sacs en toile ou ses bocaux. On peut aussi en acheter sur place. D’ailleurs tout le magasin a été conçu sur la base d’une réflexion autour du recyclage : ce sont les Chiffonniers de la Joie (Association de réinsertion professionnelle) qui ont travaillé sur le mobilier de l’épicerie.

Le zéro déchet et la pédagogie

Les filles des Jeannettes voient aussi leur activité comme une mission pédagogique. Depuis l’ouverture, elles organisent des ateliers pour fabriquer soi-même son propre shampoing, ses produits d’entretien ou de cosmétique. Elles font appel à des intervenants extérieurs. Les ateliers sont très fréquentés.
« Ce sont le plus souvent des femmes qui viennent aux ateliers, elles sont souvent à l’initiative des démarches Famille Zéro Déchets. On en a beaucoup parlé ces temps-ci, Morlaix Communauté est d’ailleurs à l’initiative d’ateliers sur tout le territoire, on y aurait bien participé, mais on n’a pas le temps !! »

Quelques références

  • Déo en bocal Endro (qui veut dire « environnement » en breton) : un déodorant fabriqué avec des produits naturels, conditionné dans un petit bocal en verre, fabriqué en Bretagne.
  • Les savons Natur fabriqués à Saint-Jean-Trolimon dans le Finistère composés exclusivement d’ingrédients biologiques et naturels : extraits de plantes, huiles végétales, argiles, huiles essentielles, miel, cire d’abeille…
  • Des produits cosmétiques, des brosses à dent, des lingettes démaquillantes… fabriqués par Lamazuna dans la Drôme.
  • Des légumes de saison qui poussent tout près de chez nous, à Plougonven.
  • Poder, un grossiste de légumes et de fruits Bio situé à Mespaul qui valorise la filière légumes bio bretonne et qui importe des fruits bio, aucun transport par avion.
  • Des produits laitiers de la Ferme de Brengoulou à Saint-Vougay.
  • Des pâtes de la Fabrik des 1001 pâtes à Saint-Martin-des-Champs
  • …et plein d’autres fournisseurs que je vous invite à venir découvrir à l’Épicerie des Jeannettes, Place Allende, à Morlaix.

L’implantation de Citroën à Rennes

Ci-dessus, la Janais. Photographie prise le 26 janvier 1963 par Heurtier. L’Ami 6 est la première voiture fabriquée à Rennes. Source : portail documentaire du musée de Bretagne

On l’a vu récemment dans la presse, la Région Bretagne fait campagne pour inciter à « passer à l’ouest », changer de vie, travailler autrement, dans un cadre différent. Elle met le paquet sur l’attractivité du territoire. Elle a des atouts culturels, elle offre une qualité de vie exceptionnelle, elle est riche en entreprises innovantes. Dans le domaine industriel en particulier, la Bretagne compte aujourd’hui parmi les régions les plus dynamiques de France.
Retour sur l’histoire récente de l’industrie en Bretagne.


Citroën en Bretagne, la genèse

Au début des années 50, presque tous les constructeurs automobiles français ont leurs usines en région parisienne. Citroën a déjà implanté à Rennes une usine de caoutchouc et de roulements à billes : la Barre-Thomas (1953).

A partir de 1955, l’Etat impose la construction des nouvelles usines en province, avec avantages financiers à la clé. La Bretagne fait partie d’un vaste programme de développement économique : le plan d’aménagement et de modernisation de la région s’élève à 200 milliards d’anciens francs. Seulement, on hésite, car la Bretagne est excentrée ; les infrastructures pour rallier la capitale sont insuffisantes, les trains sont particulièrement lents (pas plus de 100 km/h au début des années 60 entre Rennes et Paris !). Lorsque Citroën cherche un lieu d’implantation, Reims, Amiens, Châlons-sur-Marne et Rennes se portent candidates.
En fin de sélection, c’est Reims contre Rennes.

La région Bretagne a des atouts : elle a de la main d’œuvre à proposer. Le terrain sélectionné est idéalement situé en périphérie, sur une surface gigantesque et quasiment plate : un gros avantage qui évite des travaux de terrassement particulièrement coûteux. Et puis Pierre Bercot, le patron de Citroën a des attaches dans le Finistère. Sa préférence va naturellement à Rennes.

La proximité de la Barre-Thomas jouera également en faveur de la décision finale.

1960, installation de Citroën à La Janais

L’usine de la Janais en 1961, la première usine Citroën implantée en province.
Source Inventaire général, ADAGP

Une concentration de toutes les compétences

En 1960, l’usine de la Janais est inaugurée par le Général de Gaulle. L’année suivante débute la production de l’Ami 6, puis de l’Ami 8 et de l’Ami Super (une version plus puissante de l’Ami 8). C’est une usine de carrosserie et de montage hyper moderne. Le dessin, la conception et la fabrication se font à la Janais, une fierté pour les Bretons qui y travaillent. Dans le reportage suivant (INA), on met l’accent sur la qualité de la main d’œuvre bretonne et sur les opportunités d’emploi : « Mais savez-vous que ces voitures sont l’exemple type du produit breton ? » , « En 1969, 60% des employés sont bretons, et parmi les Parisiens embauchés à l’usine, 30 % sont d’origine bretonne. »
Citroën devient le premier employeur privé de l’agglomération rennaise

Une main d’œuvre d’ouvriers paysans

Beaucoup d’ouvriers sont aussi paysans. Les conditions de travail et la production à la ferme sont bien souvent difficiles, l’agriculture bretonne n’est pas au plus haut de sa forme. Avoir plusieurs emplois est une opportunité pour s’en sortir. Certains abandonnent la ferme pour trouver une stabilité à l’usine Citroën, d’autres combinent les deux emplois en mettant de côté, pour tenter de donner un second souffle à l’exploitation et investir dans du matériel.
Cette main d’œuvre est très appréciée des dirigeants de Citroën : les paysans sont fiables, ils ont des connaissances dans de nombreux domaines, ils sont courageux, ils s’adaptent très facilement.

Une vidéo très intéressante sur les ouvriers paysans de la Janais

L’usine de la Janais en quelques chiffres

  • 24 ha de site industriel
  • 20 km de routes et pistes intérieures
  • 18 voies ferrées pour acheminer les véhicules sur une grand ligne
  • 1 200 véhicules produits aux débuts de l’usine en 1961
  • 6 000 salariés en 1967
  • 14 000 salariés au début des années 80
  • 9 936 salariés en 2000
L’Ami 8, la GS et la Dyane sont produites sur le site de la Janais.

Sources

  • Inventaire du patrimoine culturel en Bretagne : en savoir +
  • Portail documentaire du musée de Bretagne et de l’écomusée du pays de Rennes : en savoir +
  • Archives de PSA Peugeot Citroën : en savoir +

Design et économie responsable

On a beaucoup parlé durant cette dernière décennie d’éco-design, une branche du design d’objet très axée sur la recherche de matériaux issus de productions responsables (bois, caoutchouc, métal etc.), sur les questions de respect de l’humain dans le processus de création.
Pour Yannick Roualec, le design est écolo par définition. C’est même bien souvent une des raisons qui poussent ses clients à passer la porte d’Arte Diem, un magasin incontournable de 700 m2 situé en plein cœur de ville.

Yannick Roualec est un passionné d’art dans sa définition la plus large : beaux-arts, création contemporaine, jazz, théâtre, design. C’est un grand lecteur aussi. Il aime les polars, les bouquins d’art, il a le goût de la découverte. Il réfléchit au sens du monde, au sens qu’il veut donner aux choses.

Un parcours atypique

Yannick Roualec ne se prédestinait pas à des études d’art ; c’est dans un lycée technique agricole du nord de la France qu’il se retrouve après la troisième. Pas vraiment à sa place. Il en a conscience dès la première semaine de cours. Il passe son Bac Professionnel, cherche à s’orienter vers une formation d’éducateur sportif pour devenir prof de tennis, et puis, finalement, passe un bac B.
Entre-temps, Yannick a pris conscience de son appétit pour l’Art. Ses réflexions le mènent à Paris, où il intègre l’École Supérieure Internationale d’Art et Gestion.

Première entreprise à Paris

Yannick Roualec a le goût de l’indépendance : il installe sa première entreprise à Paris et propose aux Musées la création d’objets pour leurs boutiques (Réunion des Musées Nationaux, Musée de la Poste, Musée des Invalides, Paris Musées etc.), et des séries limitées pour des marques (Zippo avec une série Art Contemporain créée par Joël Ducorroy, Jérôme Mesnager, Miguel Chevalier) ; il rencontre les designers Catherine et Sigolène à l’origine de la marque Tsé Tsé… Il s’intéresse au travail de Ronan et Erwan Bouroullec. Il exposera plus tard leurs talents dans son magasin de Morlaix.

Le choix d’une implantation en centre ville

« J’ai besoin que ça bouge, que ça avance, d’avoir des projets en permanence. J’avais une attirance particulière pour la région, pas uniquement parce que j’en suis originaire, aussi pour des attachements culturels ; encore étudiant, j’avais monté une expo à Paris sur le peintre Maurice le Scouëzec pour lequel j’ai une grande admiration, c’était un projet passionnant ; 3000 œuvres avaient été retrouvées dans un grenier de Brasparts, il fallait les rendre publiques. Je crois que ce travail a renforcé ce lien avec le Pays de Morlaix »

En 1996, Yannick, originaire de l’île de Batz, recherche une ville bretonne où concrétiser un nouveau projet. Il fait le tour des villes du Finistère ; c’est important pour lui de s’implanter en centre ville, c’est le premier signe de son engagement éco-responsable.
C’est rue d’Aiguillon qu’il ouvre sa première boutique morlaisienne en novembre 1996. La boutique présente une sélection d’objets.

Très rapidement, il est contacté par des marques de mobilier comme Kartell. Il prend conscience de l’existence d’un marché de conseil puis étoffe son catalogue avec des fournisseurs de mobilier comme Ligne Roset, Vitra, Fermob, Gervasoni…de grandes marques européennes qui fabriquent en local.

Un nouvel espace : un chantier écolo

En 2007, c’est l’installation place Allende. Il faut transformer cette succession de petits bureaux en un grand espace, pour lui donner un aspect presque industriel. Yannick recherche à redonner au lieu une certaine forme d’authenticité esthétique : il refuse le placo et la peinture pour laisser le lieu vivre de son passé.

Dans la montée d’escalier, les entreprises proposent de déshabiller les murs de leur vieux revêtement puis de reposer du placo. Yannick Roualec refuse l’utilisation de matériaux polluants ; il va conserver l’aspect des murs tels qu’il les trouve.

En 2007, on parle encore assez peu de recyclage sur les chantiers. La question commence tout juste à se faire entendre dans les médias, mais les habitudes n’ont pas encore beaucoup changé. Le chantier d’Arte Diem est qualifié par la presse « d’exemplaire » au niveau du recyclage des déchets.

Un choix de fournisseurs éco-responsables

« L’objet design, c’est presque toujours un objet économiquement responsable. Mes clients posent parfois la question de la provenance du produit ; je vois récemment émerger une très forte demande sur le MADE IN FRANCE »

Yannick Roualec l’a vraiment ressentie cette évolution, cette prise de conscience écologique des clients. D’année en année, ils ont commencé à poser de plus en plus fréquemment des questions relatives à la traçabilité, aux matériaux utilisés. Aujourd’hui, c’est devenu une évidence : l’objet design est écologique. Mais au delà de ses qualités esthétiques et environnementales, il est désormais question de proximité de fabrication.

Quelques exemples :

Cette bibliothèque KAO est conçue et fabriquée par Drugeot dans du chêne de pays 100% massif en Anjou.

Drugeot, c’est une entreprise familiale en Anjou. Le père déjà, passionné de bois, oriente l’activité de son entreprise vers la fabrication de meubles en bois massif. Ses deux fils, en reprenant l’entreprise en 2000, apportent un nouveau souffle résolument contemporain en faisant appel à des designers français.

La gamme de broches Solar de Constance Guisset, un pur produit français.

80 % des chaussettes Bonne Maison sont fabriquées en France, grâce à un partenariat entre la marque et un fabricant traditionnel français qui a permis de créer un produit de très grande qualité.
Les 20 % restants sont produits en Italie. La marque revendique son éco-responsabilité.

Les produits Andrée Jardin sont fabriqués de façon artisanale à Nantes, avec du bois local, issu de forêts gérées durablement, que ce soit pour le hêtre ou le frêne thermo chauffé.

Omy, c’est l’histoire de deux illustratrices, Elvire et Marie-Cerise. Tous leurs modèles de coloriages XXL sont créés à Paris et imprimés à quelques kilomètres de leur bureau, parce que pour elles, le respect de l’environnement et le soutien de l’économie locale, c’est vital.

Dans la bibliothèque de Yannick Roualec

J’ai demandé à Yannick Roualec de me citer quelques-uns de ses livres de chevet, en relation avec son métier, ses passions. « Tous ces ouvrages apportent un regard différent et purement subjectif sur l’art ou le design ».

La laideur se vend mal de Raymond Loewy, un grand designer d’objet, de publicité, d’automobile. On lui doit notamment le logo de la biscuiterie nantaise LU, des paquets de cigarette Lucky Strike ou bien encore de Monoprix ou l’Oréal.
Collection Tel chez Gallimard
Frederico Zeri décrypte les images pour en donner les plus intimes significations.
Editions Rivages
Panorama de l’Art Contemporain en France de 1960 à 2000, par Catherine Millet, co-fondatrice de la revue ArtPress.
Collection Champs Art chez Flammarion
Autobiographie de Charlotte Perriand, avant-gardiste, qui a signé une série de meubles révolutionnaires qui traversent les époques avec toujours le même succès.
Éditions Odile Jacob

Rencontre de Roland Barthes et Cy Twombly au Café de Flore en 1975, deux textes qui parlent de cet entretien.
Collection Fiction & Cie, Éditions Seuil

Bleuenn Seveno, designer textile bretonne

J’ai longuement discuté un soir avec Bleuenn, au Tempo*. Elle avait lu l’un de mes articles de blog, je crois qu’elle s’est un peu reconnue aussi dans mon histoire personnelle. Elle m’a parlé de patrimoine, d’héritage culturel, de sa vie, de son histoire et de l’influence du patrimoine breton dans son travail. On a décidé de se revoir pour échanger plus longuement.

*Le Tempo est un restaurant-bar situé sur le port de Morlaix. On y mange bien, on y fait toujours de belles rencontres.

Bleuenn Seveno est designer textile, elle est une de ces créatrices en permanente ébullition intellectuelle ; son œil s’attarde toujours, partout, sur ce qui l’entoure. Et ce qui l’entoure, c’est la Bretagne, avec tout ce qu’elle comprend, pas que le vêtement breton, non, ce serait trop réducteur, le motif aussi, la voile de bateau traditionnel, le chapiteau d’un enclos, le bois sculpté d’une cuillère ancienne… elle entend s’en nourrir tout en apportant à son travail une dimension contemporaine, voire intemporelle, parce que Bleuenn a ça en commun avec moi, un goût pour la beauté des choses simples, pour l’élégance qui s’en dégage.

La Bretagne inspire la haute couture

Je connais mal le métier de designer textile. Quant à mes connaissances relatives au vêtement traditionnel breton, elles sont assez limitées.
Bleuenn va m’initier à cette culture, me présenter le travail des créateurs qui s’en inspirent.
Elle évoque Jean-Paul Gauthier, elle me montre des photos de cette fameuse collection dessinée par ce grand nom de la haute-couture ; la maille, la dentelle, le velours, la rayure, la broderie de fil d’or, rien n’est oublié dans ce travail d’orfèvre. Du vêtement traditionnel breton, il a su retranscrire le folklore, l’exubérance des éléments avec des exagérations de volumes ou des contrastes inattendus de matières. Il est comme ça, Jean-Paul Gauthier, il aime ce qui déménage !

« C’est extraordinaire que la Bretagne et le vêtement breton inspirent les plus grands noms , et je ne suis pas étonnée vu la richesse de notre patrimoine ! »

Couverture de la revue Ar Men. Le dossier de ce numéro de mars-avril 2016 porte sur l’inspiration de la culture bretonne dans le design. Alors, oui, évidemment, Jean-Paul Gauthier est un sujet incontournable. Mais Bleuenn Seveno y est aussi mentionnée comme une référence de la mode en Bretagne.

Au gré de la conversation, Bleuenn Seveno me montre le travail de Mathias Ouvrard , Nolwenn Faligot, Pascal Jaouen… on regarde ensemble des photos de leurs créations, on s’attarde un peu sur le travail de Val Piriou.
Avec un nom pareil, elle est forcément un peu bretonne ! C’est la « Lady Bigoude » de la haute couture. Val Piriou est assez méconnue en France, alors qu’elle a acquis une notoriété étonnante au Japon, au Royaume-Uni et en Italie. Son travail allie la modernité des techniques (zip, matières élastiques, lycra, etc.) à des références plus traditionnelles qui viennent agrémenter le vêtement de couleurs et motifs bidoudens. Elle fait parfois usage de matières étonnantes comme la dentelle de corde, le raphia et même le plastique.
En savoir + sur Val Piriou

En 2010, Les Champs Libres consacrent une exposition à la créatrice bretonne Val Piriou.

Bleuenn Seveno, reconnue au Musée Départemental Breton

Le développement récent de la collection textile du Musée a désormais pris en compte la création de stylistes inspirés par les modes traditionnelles (Val Piriou, Pascal Jaouen, Bleuenn Seveno, Mathias Ouvrard, etc.)

Source : site web du musée départemental breton
Les planches d’études de Bleuenn Seveno sont exposées au Musée Départemental Breton à Quimper. Ici, photographie de son travail de recherches de fin d’études datant de la fin des années 90.

Dans les coulisses du Musée Départemental Breton à Quimper, il y a de précieuses archives. En voici deux exemples, ils illustrent avec pertinence l’esprit Bleuenn Seveno : une inspiration puisée dans le vêtement traditionnel, avec des recherches de matières, de textures et de formes empruntées au passé qui trouvent un équilibre harmonieux dans la réalité du présent : un vêtement facile à porter, toujours élégant, qui tient compte des exigences d’une vie moderne.

Tunique bustier avec un top en cache-coeur.
© Bleuenn Seveno – Collections du Musée Départemental Breton
Bustier et jupe modulable. La matière et la couleur de la jupe rappellent les voiles des bateaux traditionnels bretons.
© Bleuenn Seveno – Collections du Musée Départemental Breton

Techniques de fabrication

Le patrimoine passe aussi par des choix de techniques de fabrication traditionnelle. En Bretagne, on est bien attaché au made in France, voire carrément au made in BZH. Alors, il existe des manufactures plus ou moins importantes qui travaillent la maille, Bleuenn les connaît toutes : Le Minor à Guidel, Roc’han Maille à Rohan (Morbihan), Real Stamm à la Regrippière (du côté de Nantes). Un marché sur une voie ascendante qui revendique un maintien de l’emploi en local, qui garantit un savoir-faire traditionnel de qualité, qui développe son activité en accord avec ses valeurs de développement durable.
C’est même tellement porteur que E. Leclerc a créé sa propre marque dans l’Ouest, Breizh Mod, pour laquelle Bleuenn travaille depuis sa création, elle a même toute une page sur le site de Breizh Mod qui lui est dédiée !

Ce pull en laine Mérinos est confectionné selon la technique du point de Rome. Il est fabriqué par Real Stamm, tout près de Nantes à La Regrippière. Selon Bleuenn Seveno, la rayure, c’est l’ADN du pull breton. Elle adore la travailler, la réinventer, la détourner. ©Création Bleuenn Seveno pour Breizh Mod, Photographie de Maïwenn Nicolas.

Dans la bibliothèque de Bleuenn Seveno

Voici quelques ouvrages de référence que Bleuenn Seveno a décortiqués de long en large !

Le Costume Breton- R-Y Creston, Editions Tchou
Le Minor-Armel Morgant, Editions Coop Breizh.
Seiz Breur – Editions Locus Solus.
Costumes Bretons – François Hippolyte Lalaisse. Editions Bibliothèque de l’Image

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